La bienveillance, ça agace!

Favoriser la coopération des équipes

La bienveillance, ça agace!

Un nouveau courant de pensée est entrain d’émerger, positionnant l’altruisme, la bienveillance et la coopération comme les piliers indispensables à la survie de notre société. C’est alors qu’un contre-courant se développe. Celui de l’agacement !
Parce qu’il faut le dire:  la bienveillance ça nous énerve !

Matthieu Ricard solidement appuyé par la communauté de recherche en neurosciences n’a de cesse de clamer la force de la bienveillance. Les recherches en symbiogenèse [1] redonnent de la légitimité au phénomène de coopération dans la transformation des organismes. Malheureusement, culturellement, nous opposons des résistances à accepter la chose.

La bienveillance … un concept mou?

Parlez nous de poigne, d’effort, d’exigence, de responsabilité,  tout cela avec des gros yeux et des lunettes sur le bout du nez… On approuvera !hierarchie
Mais la bienveillance… quand on en entend parler, on lève les yeux au ciel comme on le fait lors d’une scène de liesse à la fin d’un blockbuster américain.

Par exemple, en 2014, un syndicat d’inspecteurs de l’éducation nationale exprimait sa méfiance face à l’utilisation de ce terme dans la dernière loi d’orientation. En effet, son représentant le qualifiait de « concept mou », phénomène de mode dans le monde du coaching et du développement personnel. L’accusant même d’être lié au concept néo-libéral du système scolaire.[2]

Modèle de société fondé sur la compétition

Mais pourquoi cet agacement ? Parce que depuis la révolution industrielle, notre société moderne est fondée sur un modèle : la performance par compétition. La faute à qui ? A ceux qui ont mal lu Darwin [3]… On se représente la sélection naturelle comme un phénomène où le plus fort l’emporte sur le plus faible. Mais on a oublié que Darwin mettait aussi l’accent sur la coopération. Du coup, on en est arrivés à ceci:

Modèle n°1 :

1. L’être humain est un individu instinctivement égoïste.
2. L’évolution se fait par sélection naturelle, un phénomène qu’on se représente comme compétitif où les plus forts survivent aux plus faibles.[3]
3. Pour que les hommes vivent et travaillent ensemble, il faut une organisation claire et hiérarchisée.  Il faut un règlement, une autorité et des sanctions.
4. Le niveau de performance du groupe est égal à la somme des performances des individus qui la composent.

C’est ainsi qu’on retrouve ce fonctionnement à tous les niveaux de notre société : écoles, entreprises, collectivités.

Par contre, le courant de pensée qui défend la force des valeurs de bienveillance, d’altruisme et de coopération, se fonde sur un deuxième modèle.

cooperationModèle n°2 :

1. Si l’être humain est génétiquement programmé pour être égoïste, il est aussi instinctivement altruiste.[4]
2. L’évolution d’une espèce résulte davantage d’un phénomène de coopération que de compétition.[4]
3. Tous les organismes vivants sont interdépendants. Donc la vue d’un acte altruiste provoque un nouvel acte altruiste. L’altruisme a la capacité de s’étendre de manière virale.
4. La bienveillance et l’altruisme favorisent la coopération et donc élèvent le niveau de performance d’une équipe.

 

La coopération et la bienveillance augmentent la performance d’équipe

Aujourd’hui, les signaux s’accumulent :

  • le premier modèle est entrain de se fissurer : recrudescence de burn out, de dépressions, individualisme, baisse des contacts sociaux.
  • le deuxième modèle tend à se valider.

En effet, en 2012, Google lance le projet Aristote, une étude dont le but est de comprendre ce qui fait qu’une équipe de travail est efficace. Après avoir comparé plusieurs centaines de groupes, le résultat de cette étude est des plus déroutant : le trait commun des équipes performantes est leur « haut degré de sécurité psychologique », dit plus simplement : la gentillesse ! [5]

De même, en improvisation, on dit qu’un bon joueur est celui qui révèle ses partenaires de jeu, qui les met en confiance, celui avec qui les autres aiment jouer[6]. Et l’expérience montre qu’en spectacle, sélectionner des joueurs qui se font confiance…même des joueurs qu’on pourrait qualifier de moyen, ça fonctionne!

Il faut donc changer de modèle. Les entreprises et les écoles doivent s’y mettre. Les espaces de travail et les salles de classes doivent être repensées pour favoriser la coopération. D’autres valeurs que celle de la performance individuelle doivent être valorisées. La bienveillance est un concept puissant. Le qualifier de « mou » c’est manquer de courage.

Références:

[1]Travaux de Lynn Margulis sur la Symbiogenèse
[2]Méfions-nous de l’usage si répandu de la notion de bienveillance … / Paul Devin, secrétaire général du SNPI-FSU
[3] Étude des notions de compétition et coopération dans l’œuvre de Charles Darwin
par Anne-Marie Gagné-Julien, Université de Montréal
[4]Reportage « Vers un monde altruiste » diffusé sur Arte
[5] What Google Learned From Its Quest to Build the Perfect Team / By CHARLES DUHIGG / NY Times magazine
[6] Truth in Comedy: The Manual of Improvisation / C Halpern , D Close, K Johnson

 

[social_share show_share_icon="yes"]